…Quand j'ai commencé ce projet j'avais l'ambition très claire de faire un livre mature sur la sexualité. Pour la première fois j'ai ressenti le besoin de travailler avec un modèle, une femme. J'ai ouvert une porte pour essayer de regarder autrement.
J'ai regardé.
J'ai dessiné et j'ai regardé vaciller mon dessin, il flottait, balloté entre une représentation idéalisé de la femme et cette réalité physique, concrète du corps de Claire. Je ne voulais pas représenter un fantasme de femme, je ne sais pas si mon dessin y échappe, je ne mesure pas l'enjeu ni les forces qui dirige mon regard de cet endroit. La tentation d'embellir, ou d'enlaidir, de styliser, de représenter une "image" de la femme est réelle et forte. Je trouve qu'il est difficile de regarder librement, voire impossible, je me suis arrêté en route pour finir le livre. Mais j'ai essayé un peu.
En dessinant ce corps, en m'approchant de l'intime, je me demandais comment regarder un sexe sans être aveuglé, comment, devant la réalité de cette chaire si étrange, peut-être monstrueuse, pouvait naître le désir?
De cette pâte humaine, des images sont apparus que je ne pouvais laisser dans le livre, ne pouvant pas les assumer, pourtant elles contiennent peut-être ce que je cherche…
Au début de ce texte je dis que j'avais l'ambition de faire un livre mature sur la sexualité, je trouve ça quand même un peu prétentieux de ma part, mais bon, c'est comme ça… Dans "le portrait de Moitié Claire" j'aborde ouvertement le thème de la sexualité, mais j'ai le sentiment que mes livres précédents sous couverts de thèmes différents, n'échappe pas à cette dimension. Le geste de dessiner contient un mystère qui me semble être relié profondément à la sexualité. Par ailleurs, ce n'est pas parce que je dessine une femme nu, un homme nu, ou une scène d'amour que je parle forcément de sexualité.
Quand je réfléchis, à ce que je voulais entreprendre dans ce livre, je suis effrayé par la complexité de ce que j'entrevois.
Je dessine! Je crois que le dessin me sauve de cet écrasement, me laisse approcher cette complexité et j'espère que je laisse dans mes livres cette complexité vivante.
En peinture, autrefois pour finir un tableau on utilisait le terme "Achever un tableau".
…
Pour ce livre j'ai utilisé des couleurs acryliques, j'arrivais à une précision qui me surprenait, mais pour le résultat final je les recouvrais d'un voile très fin de papier japonais.
Comme pour atténuer la dureté du réel?
Va savoir!
….
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