dimanche 19 février 2012

5- Le livre "Un Portrait de Moitié Claire"


Lien vers le site de "Un portrait de Moitié Claire"

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        Dans quelques jours, j'irai chez l'imprimeur à Lyon pour terminer avec les imprimeurs mon travail. Tous les choix, toutes les énergies converties, vont s'incarner dans le livre. Je suis impatient et très heureux de vivre ça.
      
        Lorsque je travaille un livre, je me concentre évidement, sur des détails,  sur une multitude  de petites parties d'un tout qui n'existe pas encore. Chaque détail dont je m'occupe s'éclaire et plonge le reste dans l'obscurité, dans l'oublie. Je glisse ainsi, d'un détail vers l'autre, j'avance, je reviens, je recommence, corrige,  j'abandonne, j'essaye autrement… Enfin,  j'éclaire une zone plus vaste et je regarde comment les détails se relient les uns aux autres, je réajuste et ainsi de suite. Cela me permet de travailler en même temps le squelette et la chair de l'histoire, c'est quelque chose qui se développe à l'horizontale et dans une épaisseur. En travaillant constamment le détail et la globalité environnante je vois apparaitre dans la succession des images les différentes formes narratives plastiques. En dessinant, en cuisinant les images, j'accepte par l'intransigeance de leurs réalités à abandonner ma vision qui les a fait naitre. Petit à petit j'avance vers les choix, c'est-à-dire que je commence à voir les éléments concrets qui vont me permettre de faire des choix.
         Pour faire un livre je me sens démunie, car je ne peux pas imaginer une globalité, c'est une notion qui m'effraie. J'ai le sentiment que si j'arrivais à me représenter "la globalité" d'un livre, elle ne pourrait être que  pauvre, réductrice et sans complexité. Bien sûr, je me fabrique une idée, mais plutôt comme une direction excitante à explorer. En passant par des détails en les considérants insignifiants, en les associant, en jouant avec eux, ils inventent ce que je ne peux imaginer, ils trouvent des réponses que je ne peux justifier, j'accepte aussi que ma parole m'échappe. En m'intéressant goulument aux détails, en acceptant de les suivre je défie ma raison, je mets mon objectif en danger (je pense à mes projets de livres qui sont arrêtés, bloqués) je crois que c'est ma manière d'inventer une globalité.
         Par ailleurs, en travaillant les détails j'oublie tout simplement l'objectif, cette amnésie heureuse me remet dans l'instant et dans une justesse qui parle et que j'écoute, ainsi aux fils des jours par un équilibre qui oscille entre le trop, le manque, l'isolement, le silence, la fatigue, la perte de sens, l'euphorie, le découragement, toutes ces émotions participent malgré moi à façonner et à inventer le livre. Accepter de ne pas savoir, aller vers l'inconnu, c'est aussi travailler, éprouver dans le quotidien la confiance que j'ai en moi, cette mise en danger va évidement re-questionner cette partie fragile en moi.
          Cette façon de travailler s'appuie aujourd'hui sur une préparation plus grande du projet une immersion plus profonde du sujet, avant de commencer le travail de matière.
          Bizarrement, en menant mes projets avec ce que je considère comme tant d'éléments aléatoires, je n'abandonne pas l'idée de trouver une justesse par rapport à quelque chose que je n'arrive pas et que je ne veux pas cerner et qui par définition se déplace dans le temps.
           Ma recherche de  justesse  par rapport à une idée veut trouver une sensation. C'est ma sensation qui décide.
J'essayerai d'en parler dans une prochaine lettre.
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2 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  2. Merci pour votre réflexion qui déchire le silence. Mes mots et ma démarche s'inventent dans le temps à la merci d'une météo. Dans mes histoires je commence à accepter que je n'ai plus rien à vous dire, mais j'ose espérer que mes histoire vous parlent.

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